Quelle stratégie bas-carbone mettre en place ?

  • Par Leyton
    • 08 Mar 2023
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stratégie nationale bas carbone : comment la mettre en place ?

La maturité des industriels face à la décarbonation

Face à l’urgence climatique, la France s’est donnée pour objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 – un objectif inscrit dans la loi relative à l’énergie et au climat depuis le 8 novembre 2019, et qui implique de diviser par six les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) sur le territoire français par rapport à 1990. Une politique ambitieuse, dans laquelle les entreprises ont un rôle crucial à jouer : selon les estimations gouvernementales, un tel objectif implique de diviser par deux la consommation d’énergie dans tous les secteurs d’activité, ainsi que de « réduire au maximum les émissions non énergétiques, issues très majoritairement du secteur agricole et des procédés industriels, » comme le décrit le texte de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).

Il semble cependant que les entreprises n’ont pas encore saisi l’ampleur du défi. Selon les chiffres de notre étude, elles ne sont que 37% à avoir effectué un bilan carbone et élaboré une stratégie en conséquence ; 20% seulement des chefs d’entreprise envisagent de mettre fin à leurs activités les plus polluantes dans le cadre d’une telle stratégie.

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Entreprises et stratégie bas carbone : où en êtes-vous ?

En outre, ils sont encore 20% à penser que la décarbonation n’est pas une priorité et seule une petite minorité – de 11% – estime qu’une stratégie bas-carbone peut améliorer la valeur du business model.

Il est pourtant impératif d’agir, pour des raisons très concrètes. Pour commencer, une réduction de leur consommation permettrait aux entreprises de mieux résister à la crise énergétique. Plus fondamentalement, il est essentiel de compter avec les impacts négatifs du changement climatique : selon le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), une augmentation des températures de 4°C pourrait coûter jusqu’à 5% de PIB mondial.

En 2006, le rapport Stern, signé du vice-président de la Banque mondiale, chiffrait pour sa part le coût de l’inaction à 5% à 20% du PIB mondial – alors qu’agir ne coûterait qu’1% du PIB.

Au-delà des coûts, beaucoup de dirigeants semblent n’avoir pas encore conscience du fait que la lutte pour le climat représente un véritable levier de croissance et de   création de valeur. De la législation à la supply chain en passant par les partenaires financiers, l’innovation et les consommateurs, la responsabilité environnementale est désormais un facteur clé de l’activité, qu’il est essentiel d’intégrer à une stratégie globale et équilibrée.

« L’entreprise est très ouverte à des changements dans le sens du développement durable et elle le perçoit comme une opportunité économique. Tout ce qui est écologie va de pair avec économie, mais c’est aussi une opportunité qui peut être marketing par le fait de se démarquer de la concurrence et mieux répondre aux attentes. » Romain Rémy, Ingénieur Chef de Projets, SERF.

Les répondants estiment que leur entreprise s’investit dans la décarbonation et la considèrent comme une entreprise responsable. D’ailleurs, près des deux tiers d’entre eux déclarent que leur entreprise a déployé ou envisage une stratégie bas-carbone et que leurs priorités s’inscrivent principalement dans la réduction de leur empreinte carbone. Signe encourageant, des actions sont menées comme la réduction de la consommation d’énergie, qui pour plus de la moitié des répondants est un facteur de performance pour leur entreprise.

Les objectifs de la décarbonation, c’est-à-dire la baisse des émissions de CO2 (ou plus largement de GES), s’imposent de plus en plus fermement aux industriels et deviennent un critère non négligeable de choix pour leurs clients. Bien gérer le changement climatique n’est pas qu’une question de moyens. Structuration d’une approche responsable, mise en place des différentes étapes, suivi et adaptation de son évolution, gestion des aides et leviers de financement... Les entreprises se doivent désormais de mettre en place un engagement complet, adapté à chaque niveau de leur activité, et qui leur permettra de s’engager durablement dans une transition énergétique efficace.

Première étape d’une stratégie bas-carbone : faire un bilan

L’élaboration d’une stratégie bas-carbone est fondamentale pour d’une part définir des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, alignés sur les Accords de Paris et sur ceux qui ont été définis par les entreprises de votre secteur, et d’autre part pour définir un plan d’action visant à atteindre ces objectifs.

L’ambition de cette stratégie est triple :

  • Réduire son impact environnemental ;
  • Réduire ses coûts liés à l’énergie ;
  • Améliorer sa compétitivité.

Pour atteindre les objectifs de l’Europe, il est nécessaire de transformer ses modèles de productions et ses process en intégrant la décarbonation dans votre stratégie.

« Nous essayons de construire un plan d’action court, moyen et long terme avec en face les investissements correspondants. Une fois ce bilan réalisé, nous commencerons à voir quels financements, aides mettre en phase de chaque projet. Aujourd’hui, nous nous inscrivons dans cette logique. » Romain Rémy, Ingénieur Chef de Projets, SERF.

La solution la plus pragmatique (et désormais obligatoire) est de réaliser un bilan d’émissions de GES, qui couvrira de préférence les 3 scopes suivants :

  • Scope 1 : émissions directes provenant des installations fixes ou mobiles situées à l’intérieur du périmètre organisationnel, c’est-à-dire émissions provenant des sources détenues ou contrôlées par l’organisme comme par exemple : combustion des sources fixes et mobiles, procédés industriels hors combustion, émissions des ruminants, biogaz des centres d’enfouissements techniques, fuites de fluides frigorigènes, fertilisation azotée, biomasses… ;
  • Scope 2 : émissions à énergie indirectes associées à la production d’électricité, de chaleur ou de vapeur importée pour les activités de l’organisation ;
  • Scope 3 : autres émissions indirectes produites par les activités de l’organisation qui ne sont pas comptabilisées au scope 2 mais qui sont liées à la chaîne de valeur complète comme par exemple : l’achat de matières premières, de services ou autres produits, déplacements des salariés, transport amont et aval des marchandises, gestions des déchets générés par les activités de l’organisme, utilisation et fin de vie des produits et services vendus, immobilisation des biens et équipements de productions…

« Notre priorité est de concentrer nos efforts sur ce qui peut réellement faire la différence. C’est pourquoi nous avons analysé notre impact environnemental sur l’ensemble du cycle de vie de nos produits – le choix des matières premières ainsi que toute la durée d’utilisation du produit. La majeure partie de cet impact, soit 80% vient de l’utilisation du produit au sein des foyers. Les matériaux et composants ainsi que la production et opérations pour amener ses produits jusqu’à la vente ne représentent « que » 20% de l’impact environnemental. » Agnès Vaffier, Directrice Générale, PHILIPS DOMESTIC APPLIANCES.

L’objectif de ce bilan est d’évaluer les émissions de GES produites par ses activités en vue d’élaborer des objectifs et un plan d’action pour réduire ces émissions : en réduisant ses consommations d’énergie, en éco-concevant ses produits et services, en électrifiant ses procédés, en substituant ses combustibles fossiles par des énergies renouvelables, en valorisant ses énergies fatales, en développant l’autoconsommation, ou encore en investissant dans des projets de compensation carbone volontaire.

Il est à noter que l’ensemble des démarches entreprises peut être financé par des dispositifs d’aides et subventions mis en place pour soutenir les actions de décarbonation.

« De plus en plus d’entreprises (et notamment de grands groupes) travaillent sur leur scope 3 et toutes les entreprises industrielles, quelles que soient leurs tailles, sont toutes le scope 3 d’une autre : il faut donc absolument qu’elles réagissent pour s’aligner à cette demande de baisse des émissions de carbone, d’où la notion de survie économique… » Anne Guerin, Directrice Executive, BPI FRANCE.

Pour rappel, le bilan complet de GES est obligatoire et à réviser tous les 4 ans pour :

  • Les entreprises de plus de 500 salariés (les 500 salariés devant faire partie d’une même entité) ;
  • Les entreprises de plus de 250 salariés dans les régions et les départements d’outre-mer. (et dès 2025 pour le reste du territoire européen).

Enfin, un bilan simplifié d’émissions de GES est désormais obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés et de moins de 500 salariés qui bénéficient de crédits du Plan de Relance (mis à jour tous les trois ans). Il doit être effectué avant le 31 décembre 2023 pour les entreprises ayant entre 51 et 250 salariés.

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Leyton

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