Les contributions des entreprises de l’industrie pharmaceutique, remises en cause ?

  • Par Amélie Le Thomas
    • 26 Mar 2024
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Les contributions des entreprises de l’industrie pharmaceutique, remises en cause ?

Il existe plusieurs contributions pharmaceutiques, pesant sur les exploitants de spécialités pharmaceutiques. Ces contributions financières sont assises sur des assiettes dont les règles de détermination et de calcul sont très variées. Le recouvrement et la collecte de ces taxes sont assurés par une cellule spécialisée de l’URSSAF située dans l’Île-de-France (pour toutes les sociétés dont le siège social se trouve en Île-de-France ou dans les DOM-TOM) et dans le Rhône-Alpes (pour l’intégralité des autres sociétés).

> On dénombre sept contributions pharmaceutiques

  • la contribution sur le chiffre d’affaires dite de base ;
  • la contribution sur le chiffre d’affaires dite additionnelle ;
  • la contribution sur les dépenses de promotion des médicaments (article L245-1 du CSS) ;
  • la contribution les dépenses de promotion des dispositifs médicaux (article L245-5-1 du CSS) ;
  • la contribution dite « vente en gros » (article L138-1 du CSS) ;
  • la contribution montant M ;
  • la contribution montant Z.

La contribution sur le chiffre d’affaires dite de base et additionnelle, la contribution dite « vente en gros » ainsi que les contributions montant M et montant Z sont assises sur un chiffre d’affaires spécialement déterminé pour chacune d’entre elles.

Les contributions sur les dépenses de promotion des médicaments ou des dispositifs médicaux, ont quant à elles, pour base, les dépenses visant à assurer la promotion des spécialités pharmaceutiques au titre desquelles figurent, pour ne citer qu’elles : les rémunérations des délégués ou des visiteurs médicaux, ou encore les frais de publication et d’achat d’espaces publicitaires.

Au-delà des règles de détermination d’assiette, ces contributions disposent toutes, par ailleurs, de règles de calcul (abattement légal de 50 000 euros pour l’une ou 2 500 000 pour l’autre), ou encore de taux d’imposition (0,20% pour l’une ou 15% pour l’autre) individuels. Cela apporte une grande complexité dans le maniement de ces contributions dont les éléments de détermination, bien que similaires, diffèrent pour chacune d’entre elles.

> Coup de projecteur sur la contribution montant M

L’actualité jurisprudentielle frappant le secteur a été particulièrement riche d’enseignement au cours de l’année 2023. Récemment, c’est notamment la contribution montant M qui a beaucoup fait parler d’elle.

Pour rappel, chaque année, la loi de financement de la Sécurité sociale fixe un montant M (par exemple pour 2023, le montant M est fixé à 24,9 milliards d’euros). Ce montant fait office de seuil de déclenchement de la contribution : s’il est constaté que l’intégralité des entreprises redevables ont réalisé un chiffre d’affaires global dépassant le montant M, alors la contribution est mise à la charge du secteur. Afin d’apprécier le dépassement du seuil, l’Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (ACOSS) et le comité économique des produits de santé (CEPS), procèdent au calcul de la somme des chiffres d’affaires relatifs aux spécialités pharmaceutiques des entreprises concernées et minorent cette somme des remises pharmaceutiques supportées par le secteur.

Le montant ainsi déterminé permet d’apprécier non seulement le seuil de déclenchement de la contribution, mais aussi le montant général de la contribution qui sera, ensuite, réparti individuellement pour chacune des entreprises redevables.

La contribution montant M s’inscrit comme un outil de régulation du prix des médicaments dont dispose le législateur afin de respecter l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie (ONDAM). La Cour des Comptes a pu constater que la progression du montant M n’a été considérée au sein de la LFSS qu’à hauteur de 2,1% entre 2021 et 2022, quand le chiffre d’affaires net des remises du secteur de l’industrie pharmaceutique a, quant à lui, progressé à hauteur de 4,9%. Cela a mécaniquement entraîné un accroissement considérable du montant dû au titre de la contribution montant M (Sécurité sociale 2023 – mai 2023 Cour des comptes Chapitre II du rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale).

La contribution montant M constitue, donc, l’une des contributions financières les plus onéreuses frappant le secteur de l’industrie pharmaceutique et sa progression a affecté le prix des médicaments de toutes les entreprises pharmaceutiques de façon significative, quelles que soient la taille et l’organisation de celles-ci.

> Une actualité riche d’enseignements pour l’industrie pharmaceutique

Erreurs et Conséquences dans le Calcul de la Contribution Montant M

En 2019, la Cour des Comptes a déterminé, que le calcul du déclenchement de la clause de sauvegarde était entaché d’erreurs et d’irrégularités. Ces dernières ont trouvé leur source dans des insuffisances relatives au calcul des remises pharmaceutiques venant minorer le montant à prendre en compte afin d’apprécier le déclenchement de la contribution.

Plus précisément, l’ACOSS, après avis du CEPS, a considéré que le chiffre d’affaires à retenir pour l’année 2019 s’élevait à 23 876 028 800 €. Elle en a ainsi déduit que le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde avait été dépassé et a retenu un montant de contribution M 2019 de 158 545 749 € à répartir entre l’intégralité des entreprises redevables.

Cependant, la Cour des Comptes a constaté que l’ACOSS n’avait pas comptabilisé la somme de 696 000 000 € au titre des « remises ATU » et « post-ATU » venant en diminution du chiffre d’affaires retenu pour apprécier le déclenchement et le montant la contribution montant M.

Il en a donc été conclu que le chiffre d’affaires retenu pour l’année 2019 devait être recalculé à hauteur de 23 180 028 800 €. Ce montant était donc inférieur au seuil du montant M 2019 défini par le législateur, de sorte que la contribution M n’avait pas lieu d’être appelée au titre de l’année 2019.

Ainsi, dans des arrêts en date du 20 mars 2023, la Cour Administrative d’Appel de Paris, a affirmé que la contribution montant M 2019, facturée en novembre 2020 par le CEPS, n’était pas due, et ce, qu’elle ait été acquittée sous forme de contribution ou de remises de l’article L.138-13 du CSS.

Réforme de la Contribution et Défis pour l’Industrie Pharmaceutique

Enfin, il convient de souligner que ces mécanismes de détermination de la contribution montant M tout à fait singuliers, rendent son estimation particulièrement difficile, et ne permettent pas aux entreprises redevables d’en estimer ou d’en provisionner le montant aisément.  

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 a procédé à une réforme partielle des modalités de déclaration et de calcul de la contribution montant M. Les principales modifications tiennent à son harmonisation avec les règles et le calendrier déclaratif de la contribution montant Z.

Le challenge de ces taxes s’avère être une nécessité pour les entreprises du secteur de l’industrie pharmaceutique, lourdement impacté par le poids de ces contributions en constante croissance depuis plusieurs années.

Leyton accompagne de nombreux acteurs du secteur pharmaceutique dans l’analyse de ces contributions financières. Nos experts seniors de la fiscalité déploient des leviers sécurisés sur l’ensemble des contributions pharmaceutiques pour venir réduire le chiffre d’affaires ou les dépenses comprises dans l’assiette de ces contributions et baisser, ainsi, les montants acquittés.

Demandez une analyse gracieuse de vos contributions financières

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Amélie Le Thomas
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