Lutte contre la fraude fiscale : de nouvelles mesures sur le droit à l’erreur et paiement systématique des intérêts moratoires

  • Par Amélie Le Thomas
    • 21 Juin 2023
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Lutte contre la fraude fiscale : nouvelles mesures sur le droit à l’erreur et paiement systématique des intérêts moratoires

Le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, a récemment dévoilé un ensemble de mesures visant à intensifier la lutte contre la fraude fiscale et douanière. Cette initiative constitue le premier volet de la feuille de route gouvernementale, qui vise à éradiquer les fraudes touchant les finances publiques.

Le contrôle fiscal et douanier représente une arme majeure pour protéger les intérêts financiers de l’État. Au cours de la période 2017-2021, une moyenne de 9 milliards d’euros a été recouvrée chaque année grâce aux contrôles fiscaux, soit un total de 45 milliards d’euros lors du premier quinquennat. Les droits notifiés par la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) ont atteint un montant historique de 14,6 milliards d’euros en 2022.

Des contrôles renforcés et priorisés

Des objectifs ambitieux pour la fin du second quinquennat sont également annoncés. Pour les entreprises, la mise en place de la facturation électronique devrait permettre de collecter environ 3 milliards d’euros de recettes supplémentaires. Par ailleurs, une priorité sera accordée aux contrôles des grandes entreprises, tout en renforçant l’accompagnement fiscal des petites et moyennes entreprises (PME).

D’ici 2027, environ 8 500 PME et 160 grands groupes bénéficieront de cet accompagnement.

Le gouvernement prévoit également un renforcement sans précédent des moyens dédiés à la lutte contre la fraude fiscale. Les effectifs du contrôle fiscal et de la lutte contre la fraude seront augmentés de 15% d’ici la fin du quinquennat, ce qui correspond à 1 500 équivalents temps-plein supplémentaires.

Création de nouveaux dispositifs et conseils pour répondre aux objectifs de la lutte contre la fraude fiscale

> Création d’un Conseil de l’évaluation des fraudes

Une autre mesure annoncée concerne la création d’un Conseil de l’évaluation des fraudes, présidé par le ministre des Comptes publics. Ce conseil réunira les administrations compétentes, des personnalités qualifiées, des experts indépendants et des parlementaires afin d’assurer la fiabilité des estimations produites. À partir de 2025, la fraude fiscale évitée sera évaluée par la DGFiP, et un objectif annuel sera proposé au Parlement. Il convient de rappeler que l’ampleur de la fraude fiscale fait l’objet d’évaluations publiques dans de nombreux pays depuis plusieurs années.

> Création d’une cellule de renseignement fiscal

Parmi les autres initiatives annoncées, la création d’une cellule de renseignement fiscal se démarque. Cette cellule mettra en œuvre les techniques de renseignement prévues par le code de sécurité intérieure pour rechercher et prévenir les fraudes fiscales les plus complexes et les plus graves. Les moyens déployés seront principalement utilisés pour lutter contre les situations où les outils de contrôle fiscal actuels sont inefficaces. Cela va notamment concerner la dissimulation d’avoirs dans des pays à fiscalité privilégiée ou au sein d’entités opaques telles que les trusts, et le recours à des pratiques abusives de défiscalisation et d’optimisation fiscale.

> Engagement international en faveur de la transparence fiscale

Par ailleurs, la France prendra la tête d’une initiative internationale en faveur de la transparence fiscale. S’appuyant sur les travaux de l’OCDE, cette initiative vise à accélérer et à renforcer l’échange d’informations utiles entre les États. L’objectif final de cette démarche est de parvenir à une connaissance complète de la détention du patrimoine mondial d’un contribuable.

> Des nouvelles mesures seront également mises en place pour renforcer la capacité de contrôle et de repression

Une réforme sera également inscrite dans le projet de loi de finances (PLF) 2024 afin de renforcer la capacité de l’administration à détecter, sanctionner et responsabiliser les multinationales qui pratiqueraient des politiques de prix de transfert abusives. Le seuil déclenchant l’obligation de présenter en permanence une documentation complète sur la politique de prix de transfert sera abaissé, et cette documentation deviendra opposable.

De plus, le délai de reprise de l’administration sera prolongé pour les transferts d’actifs incorporels, afin de permettre à la DGFiP d’appliquer pleinement les règles définies par l’OCDE pour contrôler les prix de ces cessions. En contrepartie de ces obligations déclaratives étendues pour les entreprises, des renforts substantiels seront apportés aux équipes de la DGFiP afin de réduire les délais de traitement des demandes d’accords préalables en matière de prix de transfert (APP) des entreprises.

D’autres mesures inédites seront mises en place pour lutter contre les sociétés éphémères qui organisent leur dissolution après la commission d’une fraude. Le détournement de Transmission Universelle de Patrimoine (TUP) sera dorénavant soumis à une obligation d’information des services de l’Etat ainsi qu’au respect d’un délai d’opposition de 60 jours. Le recours à la liquidation amiable des sociétés sera, quant à elle, conditionné à l’absence de dettes fiscales ou sociales.

La judiciarisation des fraudes sera renforcée en étendant le modèle de la « police fiscale » à toutes les fraudes aux finances publiques de grande envergure. Des enquêtes mixtes avec les services d’enquête administratifs seront également développées entre les services de l’État afin de décloisonner les données utiles à la lutte contre les fraudes. D’ici la fin de l’année 2023, des protocoles de coopération inédits seront ainsi conclus entre la douane et la DGFIP, ainsi qu’entre la DGFIP et l’URSSAF – Caisse nationale.

Enfin, la dynamique du droit à l’erreur, initiée par la loi n° 2018-727 pour un État au service d’une société de confiance (ESSOC), sera prolongée et renforcée. Les régularisations proactives par l’administration seront généralisées au sein de la DGFiP.

Afin de garantir une indemnisation équitable en cas d’erreur, des intérêts moratoires seront systématiquement versés par l’administration aux contribuables chaque fois qu’une erreur est commise. Le montant de ces intérêts sera calculé en fonction du retard pris pour restituer la somme indue. Il est important de souligner que cette mesure ne couvrira pas les cas où le fonctionnement de l’impôt implique des remboursements sans qu’aucune erreur n’ait été commise.

Rappelons que lorsque l’administration répond favorablement au profit du contribuable en prononçant la décharge totale ou partielle d’une imposition contestée par voie de réclamation, cela entraîne le remboursement de sommes déjà versées au Trésor. Les sommes ainsi remboursées sont majorées des intérêts moratoires, si certaines conditions figurant au livre des procédures fiscales sont remplies (livre des procédures fiscales (LFP), art. L. 208). Le taux des intérêts moratoires s’élève à 0,40% par mois pour les intérêts courus jusqu’au 31 décembre 2017, et de 0,20% à compter du 1er janvier 2018.

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Amélie Le Thomas

Consultante, en charge du développement fiscal

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