La TVA comme levier de changement : comment peut-elle influencer la fiscalité de l’énergie ?

  • Par Amélie Le Thomas
    • 17 Juil 2023
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La TVA comme levier de changement : comment peut-elle influencer l'énergie et la fiscalité ?

Le conseil des prélèvements obligatoires (le CPO) a publié en février dernier un rapport sur le système de TVA français. Ce rapport intitulé « La taxe sur la valeur ajoutée (TVA), un impôt à recentrer sur son objectif de rendement pour les finances publiques », replace et redimensionne clairement la TVA dans notre système fiscal, et propose une analyse exhaustive des recettes que cette dernière génère.

Tout d’abord, rappelons ce que représente à l’échelle nationale la TVA. La TVA constitue 167,2 milliards d’euros de recettes soit 37,9% des recettes du budget général de l’état selon les dernières estimations du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, au sein du projet de loi de finances pour 2023.

Le rapport du CPO dresse divers constats à propos de la TVA. Plusieurs ont retenu notre attention et nous les décryptons pour vous :

1. Bien qu’elles soient coûteuses et inefficaces, la France a davantage recours aux politiques de taux réduits de TVA que ses voisins européens.

Le CPO constate que, la TVA représente 17% des prélèvements obligatoires de la France en 2021, et cela la place au 24ème rang sur les 27 de l’Union européenne en termes de poids de la TVA dans les prélèvements obligatoires. Plusieurs raisons expliquent cette situation :

  • Tout d’abord, la France a adopté un taux normal de TVA parmi les plus bas de l’Union.
  • De plus, la France a largement recours à une politique de taux réduits qui vise de plus en plus de produits. En effet, ces taux réduits portent le taux effectif de TVA en France à 9,7% en 2019. Cela en fait l’un des plus bas de l’Union Européenne.

Bien que l’adoption de taux réduits puisse être perçue comme un outil d’équité fiscale, notamment pour les ménages les plus modestes, il est extrêmement rare qu’en pratique la baisse de la TVA impacte véritablement le pouvoir d’achat. Plus particulièrement, la baisse des taux de TVA n’étant que très rarement répercutée sur le prix final à la consommation par les acteurs économiques, les taux réduits peinent à atteindre leurs objectifs économiques.

Également, le CPO remarque que les politiques de baisse des taux de TVA sont fréquemment perçues comme un outil de complexité fiscale pour les entreprises.

2. La TVA n’est donc pas un outil de pilotage conjoncturel de l’économie.

Après avoir relevé que les effets économiques des taux réduits sur les prix, l’emploi ou l’activité s’avèrent inefficaces, le CPO observe que ces derniers ne sont que très rarement abrogés.

En effet, les taux réduits de TVA représentent actuellement une dépense fiscale évaluée à 47 milliards d’euros. Cela représenterait environ de 24% du rendement de la TVA. Le coût des mesures des taux réduits adoptées apparait particulièrement élevé et ainsi, décorrélé d’objectifs difficilement atteints qui plus est. Le CPO cite à cet effet l’exemple du taux réduit sur les travaux d’entretien et d’amélioration des logements de plus de deux ans.

Enfin, le CPO observe que la fraude à la TVA s’est accentuée depuis 2015. Cela s’explique par l’ampleur que prennent les nouveaux mécanismes frauduleux qui ne se cantonnent plus à la fraude dite « carrousel » bien connu des services publics. Le CPO pointe notamment du doigt les nouveaux mécanismes permis par l’apparition des technologies numériques et le manque d’appréhension de ces dernières par l’administration. Le CPO identifie donc clairement le besoin d’établir de nouveaux instruments de lutte contre la fraude et de simplification de la collecte de TVA pour les entreprises suite à la réforme de la facturation électronique.

3. Une baisse de la TVA ne permet pas d’établir une solution à long terme face à la crise énergétique.

Le CPO rappelle l’importance que la TVA reste un impôt de rendement ayant pour objectif premier le financement des services publics.

De surcroit, le CPO affirme que la mise en place de baisses de TVA, générales ou ciblées, en tant qu’outils de lutte contre les conséquences des crises actuelles, est vivement déconseillée.

À ce titre, le CPO salue les récentes politiques françaises de lutte contre la crise énergétique. En effet, là où les voisins européens, soit 20 des 27 pays de l’Union Européenne, ont adopté des taux réduits de TVA sur l’énergie, la France à eu recours à d’autres mécanismes de politique de baisse des prix. Le CPO relève, à ce propos, que le « bouclier tarifaire » français, qui a pu prendre la forme, tant d’un gel des prix que d’un plafonnement de la hausse de ces derniers, a eu un réel impact sur le pouvoir d’achat des ménages les plus vulnérables. Enfin, des mécanismes de politique de soutien direct aux ménages semblent plus adaptés afin de répondre à la crise énergétique. Ainsi, le CPO souligne que, les outils tels que le chèque énergie, remplissent mieux les objectifs d’efficacité économique et d’équité fiscale que l’adoption de taux réduits de TVA. Pour illustrer son propos, le CPO estime qu’une baisse du taux de TVA pour le porter à 10% sur l’électricité entrainerait un impact sur le prix trois fois inférieur à celui du « bouclier tarifaire ».

Enfin, le CPO conclu en mettant en exergue la nécessité de procéder à une réflexion globale portant sur la fiscalité des énergies. Cette réflexion devra avoir pour objectif de s’inscrire dans une dynamique de meilleure appréhension les enjeux de la fiscalité énergétique et environnementale et du prix du carbone.

En définitive, le CPO conclu que la TVA est un outil moins efficace et moins efficient que d’autres pour relever les défis socio-économiques de long terme.

Nous pouvons donc synthétiser les trois principales préconisations du conseil des prélèvements obligatoires comme suit :

  • Face aux inégalités de revenu, des politiques ciblées sont à favoriser, contrairement à une baisse de la TVA sur les produits de première nécessité.
  • La TVA n’est pas le meilleur instrument de réponse aux nouveaux enjeux environnementaux et de santé publique.
  • Un soutien sectoriel doit être adopté plus régulièrement qu’une baisse de la TVA afin de soutenir les secteurs économiques « sobres ».

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Auteur

Amelie Le Thomas
Amélie Le Thomas

Consultante en charge du développement fiscal - Layton LabEx

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